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Ajouté le 12 nov. 2023

Reflexions sur les réseaux sociaux et la peinture



Depuis quelques années le monde de l'art est totalement transformé par la culture du 'direct',
largement diffusée par les réseaux sociaux. Beaucoup de galeries traditionnelles ne font plus recette
et ferment peu à peu. Cette tendance s’est encore accentuée pendant le confinement et leur
fermeture obligatoire. Beaucoup d’entre elles n’ont jamais rouvert... Des loueurs de cimaise,
exploiteurs d’artistes voire pour certains véritables escrocs, ainsi que les galeries en ligne se sont
largement développées.
Dans une galerie traditionnelle, une sélection drastique était effectuée, le nombre d’artistes était
limité et les visiteurs étaient dans la plupart des cas des amateurs et collectionneurs d'art.
Dans les galeries en ligne beaucoup de visiteurs sont des curieux, voire même souvent des
artistes qui s'autocongratulent entre eux. Même si les galeries en ligne sérieuses font une sélection
on se retrouve noyé parmi des milliers d’artistes du monde entier.
Je suis moi-même maintenant sur plusieurs galeries en ligne, avec des milliers d’autres …
Malgré cet inconvénient cela m'a quand même permis de toucher un public nouveau (Brésil, Chine,
Japon par exemple)
Aujourd'hui tout devient une question de communication. Pour vendre, il faut se montrer, ce qui est
tout à fait logique. Le problème, c'est que souvent, il ne s'agit plus de communication objective,
reposant sur une véritable analyse de l’œuvre. Il faut faire le 'buzz', se faire voir à tout prix,
indépendamment du travail et de la qualité de l’œuvre....
Il y a quelques années une personne a voulu proposer mes œuvres à une galerie bien connue de
Haute-Savoie. Au lieu de demander à voir mon travail la galeriste lui a demandé :’il a combien de
followers sur Instagram’? (A l’époque je ne connaissais même pas instagram !) Si Cézanne vivait
aujourd'hui, combien de 'followers' aurait il? Moins sûrement que Koons, expert en communication,
ou Bansky qui a récemment programmé la destruction d'une de ces œuvres à la fin d'une vente aux
enchères, pour créer le ‘buzz’, faisant ainsi oublier la totale nullité kitch de l’œuvre en question.
Tout est maintenant une question de fric et de coups d'éclat, au détriment de la passion artistique.
Des génies comme De Staël et Giacometti pourraient ils 'percer ' aujourd'hui? Pas sûr. Qu'est ce
qui justifie qu'un chromo de Bansky se vende beaucoup plus cher qu'un dessin de Giacometti?
Je rejoins tout à fait les propos de Nicolas Bourriaud, critique d'art qui écrit: '' Quand on arrête de
discuter des œuvres, quand les critères de jugement s'enfoncent dans le flou, c'est le fluo qui gagne
et la verroterie clinquante qui remplace le saphir-bien plus terne.''*
D'après le philosophe belge, Laurent de Sutter, le monde de l'art aujourd'hui est un univers dans
lequel ''ni goût, ni jugement, ni beauté, ni critique n'ont désormais plus la moindre importance'' **
* Beaux Arts magazine janvier 2019
** Pornographie du Monde contemporain Made in heaven de Jeff Koons, essai de Laurent de
Sutter- éditions La Lettre Volée

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